[PILOTER SA STRATEGIE] Le turnover : un enjeu stratégique pour les entreprises
Le turnover, en forte hausse, coûte bien plus cher qu’on ne l’imagine et résulte davantage d’un management défaillant ou d’une culture d’entreprise toxique que de la rémunération. Pour le réduire durablement, les entreprises doivent structurer le parcours salarié, clarifier les rôles et adopter une démarche globale centrée sur la QVCT et le management.
Un phénomène aux coûts sous-estimés
Le turnover représente aujourd'hui l'un des défis majeurs auxquels sont confrontées les entreprises françaises. Avec un taux moyen de 16 % en 2024, soit une hausse de 66 % sur la dernière décennie, la rotation du personnel n'est plus une simple variable RH mais un indicateur révélateur de la santé sociale et économique de l'organisation. De nombreux dirigeants consacrent désormais davantage de temps à limiter les départs qu'à développer leur activité. Cette réalité témoigne de l'ampleur du phénomène et de son impact sur la performance globale.
Le coût réel du remplacement d'un collaborateur demeure largement sous-évalué : remplacer un employé représente entre six et neuf mois de salaire. Pour un poste rémunéré 40 000 euros annuels, cela équivaut à une dépense de 15 000 à 30 000 euros. En effet, 81 % des employeurs ne mesurent pas l'ensemble des impacts : perte de productivité pendant la transition, disparition du savoir-faire accumulé, dégradation du moral des équipes et altération de l'image employeur.
Les véritables causes du départ
Contrairement aux idées reçues, la rémunération n'est pas le facteur déterminant du turnover. Les études démontrent qu'une culture d'entreprise toxique constitue un facteur dix fois plus prédictif qu'un salaire insuffisant. Plus de 50 % des salariés privilégient désormais la qualité de vie au travail à la rémunération.
Le management apparaît comme le premier levier de fidélisation. Le management toxique ou, à l’inverse, l'absence totale de management crées un climat délétère propice aux départs ou au désengagement des salariés. Le principe de Peter illustre un autre écueil fréquent : promouvoir un collaborateur excellent à un poste managérial pour lequel il n'est pas préparé conduit souvent à perdre simultanément un bon technicien et à créer un mauvais manager.
Structurer pour fidéliser
La clarté des rôles et des attentes constitue un facteur essentiel de rétention. L'absence de fiche de poste et de grille de compétences génère un flou préjudiciable qui empêche toute évaluation juste et toute perspective d'évolution cohérente.
Les moments clés du parcours salarié méritent une attention particulière. Bien évidement l'onboarding détermine la réussite de l'intégration : 34 % des nouvelles recrues quittent l'entreprise dans les 90 premiers jours en raison d'un mauvais ajustement culturel. Un accompagnement structuré dès les premières semaines s'avère souvent déterminant.
Trop souvent négligé, l’offboarding représente pourtant une opportunité stratégique pour comprendre les causes réelles du départ et pouvoir y remédier. Enfin, entre ces deux phases, il existe une pratique souvent méconnue : l'inboarding . Il vise à préserver l’engagement des collaborateurs déjà présents, en se souciant proactivement de leur implication au sein de l’entreprise. Il est essentiel de ne jamais oublier de porter attention aux salariés fidèles pour éviter qu'ils ne finissent par faire partie des murs, invisibles et désengagés.
Une approche globale et durable
La limitation du turnover ne relève pas d'un projet RH isolé mais d'une culture collective impliquant l'ensemble de l'organisation. Elle repose sur un management sain, des rôles clairement définis, un dialogue continu sur la qualité de vie et les conditions de travail.
La mise en place d'un comité QVCT permet d'adopter une posture proactive en traitant les irritants du quotidien avant qu'ils ne deviennent des motifs de départ. Mesurer régulièrement le le bien-être et recueillir les retours des collaborateurs offre les données nécessaires pour agir efficacement.
Fidéliser ne consiste pas à "retenir" les salariés, mais à leur donner des raisons solides de rester.